Juin 2024 - Octave cingle vers les îles Scilly

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Jérôme est arrivé samedi avec ses frères Jean et François, et Pierre est arrivé dimanche. C'était la fête sur le Port Rhu, la régate des bateaux en carton. La maison du Treiz était pleine. Lundi matin, Jean et François sont repartis, l'équipage d'Octave a fait les courses, rempli un caddy  à ras bord, chargé le bateau, on était prêt.

Mardi 11 juin 2024 - 9h25 nous larguons les amarres d'Octave au fond du Port Rhu. Cap sur Camaret.

Nous allons avoir une très belle journée de navigation : mer peu agitée, vent de 10 à 19 nœuds. Près serré, Le bateau est assez gîté, mais le beau temps fait tout passer !

Repas du jour : taboulé au poulet et céleri rémoulade.

On arrive à Camaret vers 16h, on connaît bien cette escale. Balade sur le sillon, nous admirons comme d'hab' la tour Vauban et la chapelle ND de Rocamadour. On s'installe à une terrasse sur le front de mer pour un petit verre de blanc.

Beaucoup de bateaux dans la zone visiteurs, des anglais, des hollandais.

Soirée pâtes-salade.


Mercredi 12 juin 2024 - nous passons la matinée au ponton : le capitaine a prévu le départ à 13h30 pour être à 16h à l'entrée du chenal du Four au moment de la renverse de courant, nous profiterons ainsi du courant montant pour arriver à l'Aber Ildut.

Il fait très beau, mais le vent du nord est un peu trop frais à notre goût.

13h30, nous larguons les amarres, on tente une manœuvre nouvelle, garde montante et marche avant pour écarter du ponton l'arrière du bateau.

Nous quittons Camaret. Navigation tranquille, mer assez belle. Jérôme pêche son premier maquereau que nous mangerons ce soir émietté dans du riz à l'huile d'olive, excellent.

De Camaret à la pointe St Mathieu, moteur + grand-voile, ensuite près serré toutes voiles dehors.

Il y a du monde en mer. Nous longeons la côte, plus que prévu. Nous comptions arriver sur un seul bord, nous allons quand même tirer un petit bord pour contourner les rochers avant l'entrée du chenal de l'Aber Ildut.

Pour l'arrivée, on teste une nouveauté : j'ai installé notre logiciel de navigation sur une tablette, ce qui nous permet de ne pas descendre en courant à la table à cartes pour vérifier notre route. Pierre a la tablette en main, et nous guide dans les chicanes d'entrée du port de l'Aber Ildut. Bonne technique que nous comptons utiliser entre les cailloux des îles Scilly.

Nous arrivons au ponton visiteurs de l'Aber Ildut, nous prenons la dernière place, il est 19h. Peu après un autre voilier arrive, il va se mettre à couple d'Octave. Ce seront des voisins discrets.

La météo annonce du sale temps pour demain, on va faire une pause ici.

 

Jeudi 13 juin 2024, pluie, vent jusqu'à 28 nœuds, on reste au chaud.

Lectures, siestes, on va même utiliser mon petit chauffage au gaz, parfait pour tiédir le bateau.

Premier port de débarquement d’algues d’Europe

L'Aber Ildut-Lanildut est le premier port de débarquement d’algues d’Europe. Entre 35 000 et 40 000 tonnes y sont débarquées ici chaque année. Une activité due à son emplacement géographique de premier plan, face à l’archipel de Molène et Ouessant, l’un des plus vastes champs laminaires d’Europe. Plus de 350 variétés d’algues y ont été recensées.


Vendredi 14 juin 2024 - réveil à 7h, la nuit a été bruyante, vent et pluie. Jérôme et Pierre filent prendre une douche brûlante, petit déj' comme d'hab'.

8h, notre voisin à couple se détache, et nous quittons l'Aber Ildut. 15 nœuds de vent, soleil, conditions parfaites pour monter vers l'Aber Wrac'h, même si on annonce des vagues de 1,80 m.

Comme hier, Pierre a la tablette en main et passe les chicanes de sortie du port.

Grand-voile à un ris, génois un peu roulé, on finira par le dérouler complètement. Allure grand largue, belle navigation.

Plusieurs bateaux vont dans le même sens que nous, et en particulier le BEL ESPOIR, le grand voilier de feu le Père Jaouen, que nous allons suivre jusqu'à l'Aber Wrac'h, sa base.

11h, nous passons la bouée du Libenter qui marque l'entrée dans l'Aber.

Il y avait 15 nœuds de vent dehors, mais plus nous nous enfonçons dans le chenal et plus le vent forcit, 16, 17, 18 nœuds, j'aurais espéré l'inverse.

12h, J'appelle le port à la VHF, la patronne nous dirige vers le ponton des pêcheurs. Le vent nous écrase contre le ponton. 3 gouttes de pluie, et puis du soleil.

 

L'après-midi, un français résident de Californie nous monte dans sa voiture de location vers le bourg de Landeda, nous faisons quelques courses à la supérette, et nous redescendons à pied.

Le soir, Pierre nous concocte des courgettes au fromage frais et du poulet grillé aux poivrons, excellent !

 

« C’était son truc, les cas désespérés » : l’histoire du père Jaouen et de ses voiliers d’insertion

Ses 2 grands voiliers : le Bel Espoir et le Rara Avis.

J'ai eu la chance de les voir 2 fois aux Antilles, en 2004 à St Lucy et en 2015 à St Martin.

 

Pendant près de 46 ans, le père Jaouen aura œuvré pour permettre à des jeunes en difficulté de découvrir la mer et trouver un sens à leur vie. Huit ans après sa disparition, l’association qu’il a créée perdure toujours avec cette même volonté d’ « être utile à ces jeunes mal dans leur peau ».

Il nous a quitté en mars 2016, à 95 ans. L’association Bel Espoir continue le travail, et une de leurs bases est à l’Aber Wrac’h.

 

Samedi 15 juin 2024 - la météo annonce du vent de 25 à 35 nœuds, des vagues de 3,50m, on reste au ponton. Demain les prévisions sont parfaites pour viser les îles Scilly.

On prépare le bateau : le plein d'eau, le plein de fuel, un coup de jet d'eau sur le pont.

 

Nous attendons Jean-Claude et Isabelle qui arrivent de Clohars-Fouesnant. Nous allons manger des crêpes. Après, nous partons vers l'ancien sémaphore, vue magnifique sur l'Aber, puis nous allons vers les dunes Ste-Marguerite, vue magnifique sur les rochers du large et les grosses vagues déferlantes ; c'est un jour parfait pour les kite-surfers et les wing-foils qui sont nombreux et déchaînés !

 

Avec leur voiture, Jean Claude et Isa nous emmènent à nouveau à la supérette, et nous quittent.

Dernière soirée en Europe ? Eh oui, l'Angleterre a quitté l'Europe...


Été 2022, on voulait viser l'Angleterre, mais pendant la période post-COVID, obtenir un passeport était un sport difficile, on avait renoncé, direction la Bretagne nord.

Été 2023, la tempête Patricia du début août avait été suivie de vents du nord bien installés, on était parti vers la Bretagne sud.

Été 2024, 3ème essai, cette année sera la bonne !

 

Dimanche 16 juin 2024 - 7h, on se lève. Le vent s'est calmé, les prévisions sont bonnes, le soleil est là.

9h, manœuvre tranquille pour quitter notre ponton de l'Aber Wrac'h. Pierre à la tablette nous guide pour remonter l'aber, et nous hissons les voiles. On est plusieurs voiliers proches les uns des autres.

Vent de 12 nœuds, temps assez beau, après la balise du Libenter nous prenons notre cap vers les Scilly. Il reste des vagues de 2 mètres du gros vent des jours précédents. Allure près serré.

11h30, le vent tombe, nous allons faire 1/2h de moteur, puis on repart sous  voiles, on va faire ça 3 fois jusqu'à ce que le vent s'installe bien dans l'après-midi. Octave file entre 4 et 5 nœuds.

Quelques dauphins furtifs passent, un peu trop loin à notre goût.

 

On approche du rail des cargos. 17h, on y est, et on utilise un outil formidable, l'AIS. Depuis 2010, tous les bateaux marchands de plus de 15 mètres doivent avoir un émetteur-récepteur AIS, qui envoie un signal contenant le nom du bateau, ses caractéristiques, et puis surtout sa position, sa vitesse. Sur l'ordinateur du bord nous visualisons notre bateau, mais aussi tous les bateaux autour de nous, et le logiciel de navigation nous indique les dangers éventuels de collision.

Nous passons d'abord dans le rail montant des cargos qui vont vers Rotterdam, puis 2h plus tard nous serons dans le rail descendant. Nous allons voir des cargos de toutes sortes, les plus petits font 90 mètres, ils vont à18-20 nœuds (33 à 37 km/h), et puis des pétroliers, des porte-conteneurs dont un de 345 mètres.

Sur l'écran de notre ordinateur, Octave (en rouge) entre les 2 rails des cargos. Chaque petit triangle vert est un cargo !
Sur l'écran de notre ordinateur, Octave (en rouge) entre les 2 rails des cargos. Chaque petit triangle vert est un cargo !

Menu du soir : pâtes au pesto, yaourts au sirop d'agave.

Nous organisons des quarts de 1h30 pour la nuit, à partir de 22h : Did, puis Pierre puis Jérôme, et ainsi de suite. Le veilleur doit attacher son harnais au bateau s'il sort dans le cockpit. Les 2 autres dorment (ou essaient de dormir !).

Lune gibbeuse montante, coucher de soleil à 22h30, on approche de l'été.

Dans la nuit, peu à peu le vent faiblit, et à 1h30 du matin nous démarrons le moteur qui va tourner toute la nuit. Dans le sillage du bateau, il y a une grande trainée fluorescente verdâtre créée par le plancton, par moments ce sont des boules lumineuses grosses comme des pamplemousses, parfois ce sont des particules lumineuses.

4h du matin, l'horizon s'éclaire déjà du côté du levant. Le soleil se lève à 6h15.

 

Lundi 17 juin 2024 - notre nuit en mer se termine, on approche du Royaume Uni, ici on est en heure TU + 1, alors qu'en France on est en TU + 2.

Beau temps, tout petit vent. 8h30 on est tous les 3 réveillés, on arrête le moteur, nous nous faisons un petit déjeuner tranquille dans le carré.

Une 1/2h plus tard on remet le diesel en route, les Scilly ne sont plus très loin.

On approche de l'île de St Mary's, et de son port, Hugh Town. J'appelle à la VHF le capitaine du port : "St Mary's Harbour, here is the french boat Octave, we are coming from France"...

On a préparé nos papiers, nos passeports, on s'attend à être pris d'assaut par des douaniers... Brexit oblige !

"Pas de problème, vous allez prendre une bouée visiteurs !" Ah bon ? On a mis le "Union Jack" (le pavillon anglais) et le pavillon jaune ("on demande le droit de pénétrer dans les eaux du pays") dans les barres de flèche, en théorie on n'a pas le droit de venir à terre, on doit attendre la visite des autorités...

On s'amarre, et Jérôme nous offre une lampée d'un rhum antillais de St Lucy dont on lui a fait cadeau,  excellent pour fêter notre traversée.

 106 milles nautiques, environ 196 kilomètres.

 

Dans l'après-midi, nous gonflons l'annexe, et nous inaugurons le nouveau moteur hors-bord électrique : génial ! Silencieux, efficace...

 

Nous nous présentons à la capitainerie. Nous sommes passés ici en 2019 à bord de Treizour en montant vers l'Irlande, le capitaine retrouve notre trace dans sa machine.

Je sors l’imprimé téléchargé sur Internet et consciencieusement rempli, et nos 3 passeports. D'un geste de la main, le capitaine me fait comprendre qu'il n'en veut pas... ça alors ! quand on se souvient qu'en 2022 on avait renoncé à venir ici pour raison de passeport manquant...

 

En fait, on vient d’entrer sur le territoire anglais comme autrefois, avant 2020, quand l'Angleterre était encore européenne... On est presque déçu !

 

Nous partons explorer un peu le bourg, tranquille malgré les touristes assez nombreux. Et nous commençons à imaginer les jours prochains dans cet archipel très plaisant.

Mardi 18 juin 2024 - excellente nuit, après une nuit en mer toujours un peu fatigante.

Nous partons à terre avec l'annexe et notre moteur électrique ; le vent a forci depuis hier, et le clapot s'est un peu formé dans le port. On commence à se mouiller le derrière...

Petite balade dans le bourg, quelques courses.

Retour au bateau, et là on se mouille encore plus le derrière ! Cette annexe est vraiment très basse sur l'eau - ou peut-être l'équipage est un peu lourd ?

Arrivés à bord, nous nous changeons, et les filières deviennent des fils d'étendage.

On avait imaginé de partir vers les îles de Bryher et Tresco en début d'après-midi, mais le vent monte, 16-18-20 nœuds. Nous mangeons, et finissons par choisir la tranquillité de la bouée du port. L'après-midi va être mouvementée autour de nous. On assiste, grand plaisir du mouillage, à des arrivées de voiliers un peu cafouilleuses. Certains s'y reprennent 2 ou 3 fois pour attraper le petit flotteur accroché à la grosse bouée. Nous avons bien sûr plein de bons conseils à leur donner...

Il n'y a presque plus de bouées libres le soir, mais dès le lendemain matin beaucoup seront partis, le vent ayant molli. Il y a en fait beaucoup de mouvements, de "turn over" de voiliers dans ce port ; c'est une escale où les marins voyagent, bougent...

On mange bien à bord : patates chaudes avec petits anchois, belle salade locale, ratatouille au couscous, et puis des fromages anglais, des yaourts locaux très bons.

Mercredi 19 juin 2024 - La nuit a été bruyante, le vent sifflait dans les haubans. Ce matin, le clapot s'est calmé, le vent aussi.

On découvre un service proposé par le port : un marinier sur son gros Zodiac nous accoste, nous pouvons ainsi régler notre nuit à la bouée (en Livres, avec la carte VISA...), mais il nous propose aussi de prendre nos "rubbish", nos poubelles, et nous nous empressons de sortir un gros sac !

On se prépare à aller à terre avec notre annexe : cette fois-ci on prend nos précautions, pas de veste qui traîne, pas de pantalon à sauver. On y va, ça sera moins pire qu'hier...

Douches à la capitainerie, petites courses au supermarché, puis balade vers le Star Castle, un ancien petit fort en haut de la colline qui abrite un hôtel cossu avec une vue formidable sur l'archipel.

 

En début d'après-midi, on largue notre bouée, et au moteur nous visons le chenal entre les îles de Bryher et Tresco. L'eau est transparente et verte. Nous allons explorer le mouillage devant la tour Cromwell. Beaucoup de voiliers mouillés ici, sur des bouées.

Nous savons que le vent va tourner un peu cette nuit, et nous avons prévu d'aller poser notre ancre dans Apple Tree Bay, au sud de Tresco. Choix qui s'avère très bon, la mer y est presque lisse, et nous sommes bien abrités du vent.

A marée basse il reste à peine 1,20m d'eau sous le bateau, nous avons relevé la dérive. Présages d'une nuit qui devrait être parfaite ?

Pierre à la guitare, Jérôme sur un polar, Didier sur son ordinateur. Bientôt l'apéro !

Jeudi 20 juin 2024 - nuit tranquille dans Apple Tree Bay, notre petite baie déserte.

Nous partons faire une balade sur l'île de Tresco avec notre annexe à moteur électrique. mer lisse, on ne se mouille pas les fesses !

Nous laissons l'annexe en haut de la plage, marée descendante. Nous sommes déjà venus ici il y a 5 ans, mais nous y revenons avec plaisir. Nous allons vers le jardin botanique ; l'entrée à 18 Livres par personne (environ 20 €) nous refroidit, mais tous les environs sont couverts de plantes étonnantes, des plantes grasses, des fleurs qu'on ne connaît pas.

On continue notre tour, l'île est très vallonnée, très verte bien sûr. Retour par le bourg de New Grimsby. Beaucoup de touristes, des maisons très joliment retapées qui doivent être louées, des voiturettes électriques, des bus électriques ! Ambiance assez chic, assez bourgeoise.

Retour à bord, il fait beau, le soleil est chaud, Jérôme et Pierre se baignent longuement. Le capitaine garde prudemment le bateau, au cas où un tsunami, ou une trombe...

15h30, nous remontons l'ancre, nous partons vers l'île de St Agnes, au sud-ouest de St Mary's. En passant dans le chenal entre les 2 îles, nous voyons notre premier phoque - en fait le seul qu'on verra.

Nous approchons de St Agnes, et rentrons dans une longue anse ouverte au sud, "the Cove". Il y a déjà là une dizaine de voiliers, nous allons tout au fond, près de la plage de sable, un cordon de sable submergé à marée haute. Nous y serons abrités du clapot et du vent qui devrait se lever dans la nuit.

Nous allons à terre, et partons explorer l'île. Ambiance très différente de Tresco. Première découverte, des cochons ! On fait le tour de l'île, l'atmosphère est très campagnarde, ici il y a des vraies gens, pas des touristes, pourrait-on dire. On verra même des vaches, des champs cultivés. Il fait beau, il fait doux, on se perd un peu dans des petits chemins à peine tracés dans les sous-bois.

18h, on hésite à l'embranchement qui nous ramène à la plage, on se décide à aller vers le pub "the Turks Head", avec des tables disposées sur le talus, au dessus de la cale d'accostage. Si les voisins ne parlaient pas anglais autour de nous, on se croirait presque en Grèce !

Proposition de Jérôme acceptée à l'unanimité, on se commande des fish & ships. Énormes, mais absolument excellents. Des oiseaux insolents et gonflés essaient de nous voler des morceaux, nous avons presque de la peine à les chasser de la table.

Retour au bateau avec l'annexe, la mer est lisse. Belle soirée, la lune est pleine.

Vendredi 21 juin 2024 - la fin de nuit a été agitée, un tout petit clapot venant du large a suffi pour nous gâcher notre sommeil...

Ici pas de réseau, sauf si on tient nos téléphones en l'air à bout de bras. On finit par capter une météo et on comprend que le vent va se lever dans l'après-midi. J'avais imaginé rester ici une partie de la journée, on décide de partir à 10h.

Il ne reste plus beaucoup d'eau sous le bateau, la marée basse approche. Dès qu'on sort de notre baie, le vent est là, 16 à 18 nœuds, et la mer est assez formée entre St Agnes et St Mary's.

Nous avons décidé d'aller tester le petit chenal du côté ouest de l'île de St Martin's, au nord-est de l'archipel. Il devrait être abrité du vent d'Ouest-Sud-Ouest, et le guide nous annonce quelques bouées. Solution de repli au cas où, on pourrait aller du côté Est de l'île de Tresco, où on aperçoit au passage déjà beaucoup de voiliers.

On arrive prudemment, en approchant il reste 2 mètres d'eau sous le bateau, et on a remonté la dérive. En fait des "quelques bouées" annoncées, une bouée est déjà occupée par un voilier, et une seule autre est disponible : c'est une grosse galette, pas très commode.

Le vent a monté, compliquant la manœuvre. Premier essai, en tentant de passer une amarre par le côté du bateau. Pas facile. Pierre propose d'y aller avec l'annexe qu'on traîne gonflée derrière le bateau. On le tracte le long du bateau, il va passer 3 amarres dans l'anneau de la bouée, et l'opération va bien nous prendre au moins 3/4 d'heure : ça souffle, ça tire, le bateau se met en travers du vent...

Apéro, manchons de canard avec haricots revenus aux oignons, il nous fallait bien ça pour nous remettre.

Dans l'après-midi le vent se met à souffler fort, 22-24 nœuds, le petit clapot nous secoue, et en plus il se met à pleuvoir des cordes. Une seule solution raisonnable, faire la sieste.

La météo nous assure que ça va se calmer dans la soirée.

Projet pour les jours à venir : on envisage notre retour vers la France demain samedi en fin d'après-midi, nuit en mer et traversée du rail des cargos dans la journée de Dimanche. Selon notre vitesse et selon le vent, qui devrait être assez faible, on pourrait atterrir dimanche soir à l'Aber Wrac'h, ou à l'Aber Ildut, ou même à Camaret.

Vous en saurez plus au prochain épisode, et nous aussi !

Octave au mouillage dans le chenal de St Martin's (le voilier à droite)
Octave au mouillage dans le chenal de St Martin's (le voilier à droite)

Samedi 22 juin 2024 - Le vent est un peu tombé dans la nuit. On regarde avec circonspection le petit clapot autour de nous. Il y a, à 300 mètres, une petite plage de sable blanc et une cale où débarquent les vedettes à touristes pour l'hôtel chic que nous apercevons sur la hauteur.

Après notre petit déj', le soleil est un peu masqué par moments, mais il fait doux, et la mer s'est plutôt calmée : on se décide, on va à terre. Annexe, moteur électrique, sac à dos avec de quoi se couvrir s'il fait un peu frais, et on a enfilé des vêtements déjà salés par nos dernières expéditions. On était pessimistes, mais finalement on arrive sur la plage avec le derrière sec !

Le hameau où nous arrivons s'appelle Lower Town, les 2 autres hameaux de l'île s'appellent Middle Town et Higher Town - quelle surprise ! Nous suivons un chemin de sable au dessus de la plage. Ambiance tranquille, quelques marcheurs ; à Middle Town, il y a un camping assez grand avec beaucoup de tentes, et on n'est qu'en juin - mais c'est l'été depuis hier, il est vrai...

On observe une curiosité très anglaise, les "épiceries" de bord de route : une petite étagère, quelques produits présentés, des légumes, des confitures, des petites fabrications des enfants de l'école, les prix sont affichés, on se sert et on dépose l'argent dans une tirelire ou un mug. Nous autres, petits français, nous disons que cette pratique serait impossible chez nous, hélas... Jérôme s'offre un porte-clés "fait main" avec une pièce d'1 £ récupérée dans le monnayeur des douches !

Nous faisons une pause à la "bakery" de l'île, on s'installe sur une table à l'extérieur avec un white coffee et 2 long coffees, et des pâtisseries. Là encore des oiseaux cherchent à nous voler des miettes. On prend aussi un pain frais.

 

Retour à bord, on commence à préparer le bateau pour la traversée retour, nous allons larguer notre bouée à 16h ; on veut être rentré suffisamment tôt en France pour que Pierre et Jérôme arrivent à temps afin de voter le weekend prochain, et après notre trans-Manche, ils ont encore 1000 km à faire en voiture ! Donc une nuit en mer, puis le rail des cargos demain dans la matinée, et arrivée en Bretagne dans la soirée.

Samedi 22 juin 2024 - 16h, nous quittons St Martin's, nous quittons les îles Scilly, nous abandonnons notre bouée. Les prévisions météo nous annoncent du vent sympathique pour la nuit, mais il devrait faiblir après, et nous devrons sans doute faire du moteur pour terminer ; sûrement de la brume, qui devrait se lever, espérons-le.

Nous quittons l'archipel par le Nord-Est. la mer est assez formée, mais le vent est bien installé, juste comme il faut, 14-15 nœuds. Dans les premières heures on a sans doute du courant favorable, on est à plus de 7 nœuds, puis progressivement notre vitesse se stabilise à 5 nœuds. Dans la soirée, la brouillasse tombe, avec un petit crachin très breton. La vie à bord n'est pas très confortable. Vers 20h, je fais chauffer une soupe de légumes bien épaisse, qu'on mange dans le cockpit, en se cramponnant pour ne rien renverser. Mais on est content, notre voilier marche fort !

Organisation de la nuit comme à l'aller : des quarts d'une heure et demie, Didier puis Pierre puis Jérôme, à partir de 22h.

On s'est habillés chaudement, on s'équipe de nos harnais, je sors les lampes de poche, j'allume le feu en tête de mât.

La nuit tombe doucement, la brume aussi ; un cargo chypriote passe à moins d'un mille, je l'entends mais je ne le verrai pas.

Jérôme et Pierre sont partis dans leurs cabines, mais Pierre se relève un peu plus tard, il me dit que par moments il était en apesanteur quand le voilier retombait derrière une vague ! Il va essayer de somnoler sur un banc du cockpit, puis pour la suite de la nuit il utilisera une des banquettes du carré.

Le vent faiblit. 1h du matin, 3,5 nœuds, 3 nœuds, 2,5 nœuds, 2 nœuds... J'avais proposé, avant de partir, qu'on se fixe une vitesse minimum de 4 nœuds pour la traversée pour ne pas arriver trop tard sur la côte bretonne, et pour avoir une place à un ponton.

Moteur. Nous allons faire 17 heures de moteur, et c'est usant. La mer est toujours très agitée, il faut un peu s'agripper dès qu'on se déplace. Et puis le bruit du diesel...

La consolation, ce sont les dauphins ! Ils vont venir souvent nous voir pendant cette traversée, et Pierre va s'en mettre plein les yeux. Ils ne sont pas très nombreux, 5-6, mais ce sont des gros spécimens, et ils jouent dans les remous de l'étrave.

Vers 8h30 du matin, nous arrivons dans le rail des cargos. Nous devons négocier quelques uns de ces mastodontes d'acier en modifiant notre cap ; 10° vers bâbord ou vers tribord, 20° si nécessaire. On les voit parfaitement avec l'AIS, à plusieurs milles de distance, malgré la brume. Eux aussi nous voient sur leurs écrans, mais pas un ne déviera de sa route... Mon ordinateur m'annonce la distance minimum à laquelle on va se croiser : une fois il me dira 150 mètres, pour un porte-conteneur de 227 mètres ! On s'est éloignés prudemment...

On se dirige vers l'Aber Wrac'h. Nous tentons d'arriver avant 19h en espérant qu'il y aura encore quelqu'un à la capitainerie pour nous trouver une place à un ponton. On approche et je vois avec l'AIS que beaucoup de voiliers nous précèdent dans le chenal...

La visibilité était assez mauvaise depuis la nuit dernière, parfois moins d'un mille, mais en approchant de la côte bretonne, la brume s'épaissit encore : nous essayons de voir la balise du Libenter qui marque l'entrée du chenal de l'Aber Wrac'h, on arrive enfin à la deviner quand on en est à 300 mètres !

18h30, nous arrivons au fond de l'aber, j'appelle le port à la VHF, et un marinier vient nous accueillir sur son gros Zodiac ; il nous place à couple du beau voilier d'un couple de néerlandais, tout près de là où on était il y a 8 jours. Ils ne sont pas là, nous nous amarrons proprement contre leur bord. Ils arrivent plus tard, ils sont très sympathiques, et ils parlent français.

27 heures de mer, 17 heures de moteur, enfin du silence !

Une douche chaude, et au dodo.

le trio à la crêperie de l'Aber Wrac'h
le trio à la crêperie de l'Aber Wrac'h

Lundi 24 juin 2024 - Nos voisins bataves nous avaient prévenus qu'ils s'en allaient à 8h du matin, on se lève, nous nous détachons pour les laisser partir et nous prenons leur place contre le quai. La brume épaisse de l'aube se dissipe et laisse la place à un beau soleil. Il fait presque trop chaud !

Journée tranquille au ponton, lectures, siestes, notre traversée a été fatigante et abrutissante, nous avons besoin de récupérer. On regarde les enfants de l'école de voile. Pierre a rincé le pont à l'eau douce, Octave est tout propre.

Crêperie le soir.

Nous prévoyons de partir demain matin mardi et de rallier Douarnenez dans la soirée. Eh oui, même les bonnes choses ont une fin.

 

Mardi 25 juin 2024 - Debout à 7h, Nous quittons le ponton des pêcheurs de l'Aber Wrac'h à 8h. Le ciel est moutonneux, tout petit vent de 5-6 nœuds. L'étale de pleine mer est à 8h30 : quand elle descendra, le courant descendra aussi dans le chenal du Four, vers le sud, et nous comptons bien en profiter pour accélérer. Nous prévoyons d'être à Douarnenez vers 20h, la passerelle du Port Rhu ouvre jusqu'à 21h.

11h40, on a passé le phare du Four, le soleil sort des nuages, vent de nord-est, nous allons vers le sud et nous sommes à plus de 6 nœuds, tout va bien !

13h45, la Pointe St Mathieu est à bâbord, et le vent tombe à 4 nœuds ; moteur, on en profite pour manger, mais une demi-heure plus tard le vent revient, on coupe le moteur, c'est reparti.

Nous croisons une course de voiliers Mini 6,50, ces petites bombes prévues pour faire des transatlantiques à des vitesses déraisonnables.

Très beau temps, le vent monte à 16-17 nœuds, par moments nous serons à plus de 7 nœuds en approchant du cap de la Chèvre.

Jérôme pêche 3 maquereaux, pour se consoler d'une croisière pas très fructueuse de ce côté-là.

17h, des dauphins ! Ils viennent saluer notre dernière journée en mer.

18h30, nous entrons dans le Port Rhu, la passerelle ne se lève pas pour nous, en fait elle a été enlevée, démontée !

19h, nous sommes amarrés à notre ponton, et nous prévoyons de revenir demain pour vider le bateau et lui donner un coup de jet d'eau.

Très belle navigation pour clore notre périple, nous sommes ravis : soleil, bon vent, et des dauphins !

11 heures de navigation, ça mérite de se poser et nous allons nous faire servir des crêpes et des moules au Ty Port Rhu, en face de la maison du Treiz.

 

Mercredi 26 juin 2024 - Après une nuit dans des vrais lits, on va vider le bateau : les sacs, les duvets, les boîtes de conserves, le frigo. Et puis on donne un coup de jet d'eau sur le pont.

Ce soir on reviendra avec Pierre et Jérôme pour enlever la grand-voile et le "lazy bag" (la housse de grand-voile) dont la fermeture éclair est à changer.

Pierre est venu avec son parapente dans sa voiture, il veut profiter des belles conditions météo : nous partons dans l'après-midi à la pointe de Tréfeuntec, entre les plages de Sainte-Anne-la-Palud et de Kervel, et le spectacle est magnifique, 5 ou 6 ailes volent au dessus de l'eau, avec Douarnenez en toile de fond.

Une famille est là, Papa vole sous une aile biplace avec le cadet d'une douzaine d'années, Maman a atterri, et l'ainé décolle en solo devant nous ; "il vient d'avoir 14 ans", nous dit sa maman...

 

20h, nous allons dîner au restaurant "la Trinquette" au port du Rosmeur, 3 fish & chips.

Octave est revenu à son ponton au fond du Port Rhu.
Octave est revenu à son ponton au fond du Port Rhu.

Jeudi 27 juin 2024 - Jérôme et Pierre partent à 8h du mat', grosse journée de voiture vers Grenoble, puis vers Forcalquier pour Pierre, ils vont voter !

 

Ces 15 jours de croisière ont été parfaits, l'archipel des Scilly est une très belle destination, ça faisait un moment qu'on en avait envie, et on avait bien raison !


Les îles Scilly en résumé

Les îles Scilly, également nommées Sorlingues, sont un archipel situé en mer Celtique, à l'ouest-sud-ouest de la pointe de l’Angleterre, dont elles ne sont éloignées que de 45 kilomètres.

Les îles Scilly forment un archipel de cinq îles habitées, St Mary’s, Tresco, Bryher, St Agnes, St Martin's, entourées de nombreux îlots et récifs (près de 140 au total). Elles s'étendent sur une superficie de 16,33 km2 (Ouessant : 15,5 km2).

 

Économiquement, l'archipel dépend du duché de Cornouailles, qui fournit le revenu du prince de Galles (William, le mari de Kate), lequel ne reçoit pas de subvention de la Couronne. Le tourisme est la plus importante activité économique, avec l'agriculture (exportation de fleurs) et la pêche.


Par leur position, ces îles offrent des paysages très contrastés ; l'influence océanique, combinée aux effets de la dérive nord atlantique dont les eaux réchauffées proviennent du Gulf Stream, réduit l'amplitude thermique au point que la neige ou le gel y sont rares, ce qui favorise une floraison bien plus précoce qu'en Angleterre. Les Scilly se sont donc spécialisées dans la culture de fleurs, et particulièrement les jonquilles. En revanche, les îles sont parfois exposées à des coups de vents extrêmes, qui ont par endroits modelé le paysage, notamment celui de l’île de Tresco où, tandis que la côte sud protégée abrite les luxuriants jardins de l'abbaye, les escarpements du nord de l'île sont couverts de bruyère et de rocs dénudés.

 

Les îles Scilly sont habitées depuis l'âge de pierre, de manière pratiquement autarcique jusqu'au 20ème siècle. L'archipel présente des traces de la civilisation de l'âge du bronze avec une cinquantaine de tombes mégalithiques, datant du second millénaire av. J.-C.

L'archipel pourrait correspondre aux îles Cassitérides (« îles de l’étain ») visitées par les Phéniciens et mentionnées par les Grecs. On n'y trouve cependant pas d'étain – il s'agissait peut-être d'un comptoir pour la Grande-Bretagne.

Jusqu'à récemment, les terres émergées étaient probablement bien plus vastes, et le nombre d'îles plus réduit. Un texte romain parle d'insula Scillonia au singulier, comme d'une île largement plus grande que toutes les autres. Selon une légende, les îles sont une partie du royaume perdu de Lyonesse, qui disparut sous la mer à l'exception des sommets des collines. On dit que Tristan, l'amoureux d'Iseut la blonde, était le fils du roi de Lyonesse...

 

L'archipel compte 2 153 habitants selon le recensement de 2001, répartis sur cinq îles : St Mary's 1 666 hab.), Tresco (180 hab.), St Martin's (142 hab.), St Agnes (82 hab.) et Bryher (84 hab.). Le reste de l'archipel est constitué d'îlots inhabités.